Texte fondateur du mouvement « d’Algérie-Djézaïr »
D’Algérie-Djezaïr
TEXTE FONDATEUR (2007)
Nous signataires, que nous soyons d’origine afro-berbère, judéo-berbère, arabo-berbère, ou bien issus de toutes les origines euro-méditerranéennes, habitant aujourd’hui en Algérie, en France, ou disséminés de par le monde, considérons que l’Algérie est notre pays principal ou second. Même si les lois de l’Etat français, la naturalisation des immigrés euro-méditerranéens mais aussi les violences et les vengeances de fin de guerre, les exodes judéo-européen et harki au moment de l’indépendance en 1962 et enfin l’exil intellectuel des années 90 pour fuir le terrorisme islamiste et les violences d’Etat, ont fait accéder un certain nombre d’entre nous à la nationalité française ou à celle d’un autre pays d’accueil.
Unis par la conception moderne et républicaine d’une nationalité fondée sur le sol et non sur le sang, nous ne nous sommes jamais accommodés du fait que l’indépendance de l’Algérie, qui visait à mettre fin aux inégalités du système colonial, ait eu aussi pour conséquence l’expatriation de plus d’un million de personnes. Ce qui fut l’un des plus grands déplacements de population de l’histoire de l’humanité mit ainsi un terme à une expérience de rapprochement multiethnique qui avait enfin la possibilité de se développer entre Berbères, Arabes, Pieds- Noirs, Musulmans, Juifs, Chrétiens et non-croyants.
Notre décision aujourd’hui de mêler nos noms et demain d’agir ensemble exprime précisément la volonté de réparer ce rendez-vous manqué de l’Histoire et symbolise ce que l’Algérie aurait pu être : une grande nation multiethnique intégrant toutes les émigrations que notre terre avait rassemblées depuis plusieurs milliers d’années par le commerce, la conquête, ou les exils dus à la pauvreté et aux persécutions.
Cette histoire commune ne peut pourtant être réduite uniquement à des séquences de malheur. Nous en voulons pour preuve le retour de plus en plus fréquent de Pieds-Noirs et de Juifs, dans leurs villes, villages ou hameaux d’origine, et l’accueil chaleureux qui leur est réservé, comme celui de Harkis et d’enfants de Harkis dans leurs familles.
Ensemble et en tenant compte des blessures des uns et des autres, nous voulons d’abord rétablir un dialogue qui n’aurait dû jamais cesser. Ensemble nous voulons reconstituer cette fraternité meurtrie par les dénis d’histoires et les humiliations, la guerre et les exils, les culpabilités et le silence. Fraternité toujours présente et renaissant dès que c’est possible. Ensemble, nous voulons retrouver la trace d’une histoire humaine occultée par les histoires officielles et nous défaire des visions manichéennes.
Ensemble, c’est cela que nous vous voulons transmettre à nos enfants mais aussi à l’humanité entière. Car en ces temps de recomposition violente des nations et des peuples, notre réconciliation témoignera que la haine n’est pas une fatalité de l’Histoire. Et qu’en respectant les différences des uns et des autres – culturelles et cultuelles – la fraternité pourra devenir l’horizon de l’humanité.
C’est pourquoi nous proposons aujourd’hui un Mouvement fondé sur des valeurs humanistes. Un Mouvement riche et respectueux de toutes nos diversités – ethniques, linguistiques, culturelles, religieuses ou d’opinions – qu’il nous plait d’appeler «D’Algérie-Djezaïr».
Refusant les conformismes idéologiques nous désirons instaurer une communication sans tabous entre celles et ceux que l’Histoire a séparés, encourager toutes les initiatives qui vont dans le sens de la rencontre et du dialogue, nous opposer à tous les discours haineux et à toutes les exclusions passées ou à venir, faire reculer les étroitesses identitaires, encourager les écritures de mémoires plurielles et d’une Histoire rigoureuse, faire connaître notre vision fraternelle là où nous nous trouvons et nous rassembler autour d’actions symboliques quand nous le jugerons nécessaire.
Ce faisant, nous voulons contribuer à bâtir un univers de paix en Méditerranée, et, au-delà, apporter un message d’universalité en participant aux prises de conscience planétaires.
Aboutissement de multiples rapprochements associatifs ou individuels nés de l’évolution des mentalités, des voyages, du désir de connaissance des jeunes générations et du développement de la communication grâce à internet, mais aussi du nouvel exil algérien des années 90, notre mouvement ne s’enfermera dans aucune des structures associatives connues.
Sans cotisation ni bulletin d’adhésion il manifestera sa présence en créant du lien et des synergies entre les réseaux humains qui se reconnaîtront dans sa vision et ses valeurs. Le mouvement «D’Algérie-Djezaïr» est ouvert à tous les natifs d’Algérie qui voudront le faire vivre, ainsi qu’à tous leurs descendants
Contact : Eveline Caduc, caduc@unice.fr
Quelques mots sur l’histoire de l’idée de la création du mouvement D’Algérie – Djezaïr
Chèr(e)s ami(e)s, Depuis plusieurs années, certains d’entre nous ont pris conscience de différentes manières, par des actions individuelles ou associatives, par leur travail scientifique ou artistique, par des retrouvailles après plusieurs décennies de séparation, que la cohabitation intercommunautaire avait laissé des traces profondes dans l’inconscient individuel et collectif, et que la séparation advenue avec l’indépendance en 1962 avait été vécue de part et d’autre comme une amputation. Et, chacun de notre côté, nous avons agi pour renouer.
Aujourd’hui, nous pensons que nous avons le devoir devant l’histoire et devant nos héritiers, de prendre l’initiative de nous rassembler pour réfléchir et agir, afin de panser les traumatismes de la séparation et faire advenir une histoire plus humaine.
A l’origine de ce mouvement, un premier groupe a donc pris l’initiative de rédiger ce « texte fondateur ». Ce groupe de douze souhaite que ce texte soit proposé à quelques dizaines de personnes d’origines diverses.
Après les amendements éventuels, les initiateurs et les nouveaux signataires de ce Texte Fondateur deviendraient les « membres fondateurs » de ce mouvement.
Comme nous ne désirons pas constituer une « association », la légitimité de notre Mouvement D’Algérie-Djezaïr proviendra des signatures de ses membres fondateurs et des signatures, constamment rendues publiques, de celles et ceux qui nous rejoindront.
Nous, initiateurs, avons apposé nos signatures au bas de cette lettre de présentation selon des modalités que nous vous proposons d’utiliser (et il vous reviendra d’en décider), c’est-à-dire :
-Nom, Prénom.
-Année de naissance : aspect pluri-générationnel de ce mouvement. -Lieu de naissance : pour l’Algérie d’avant 1962 mettre le nom d’alors à-collé à celui aujourd’hui, et vice-versa pour l’après 1962. Cela permettra alors à nos lecteurs de nous situer géographiquement en faisant le lien entre le passé et le présent. -Profession/Qualité : horizons les plus divers de ceux qu’il convient d’appeler « de la Société Civile ». Mais, pour sûr, notre personnalité ne s’arrête pas à cela ! Cette indication n’est donc en rien réductrice. -Lieu de résidence actuelle : les 4 coins de la planète. (par exemple : Caduc Eveline, née en 1942 à Bône/Annaba, écrivain, universitaire, Antibes. caduc@unice.fr)
Ainsi, cette première étape passée, nous diffuserons très largement notre message à l’aide d’outils informatiques modernes et performants pour aller toucher au plus loin, au plus juste.
Au plaisir de vous retrouver.
Fait à Paris le 01 octobre 2007.