Lu pour vous dans EL WATAN
le 02.05.11
Ils célèbrent la fête du travail à leur façon
Les chômeurs se sont mobilisés hier
Le regroupement, fermement quadrillé, a pu, plus d’une heure durant, discourir et tenir tête aux policiers.
Le Comité national pour la défense des droits des chômeurs (CNDDC) a tenu à célébrer, à sa façon, cette date hautement symbolique qu’est le 1er Mai, fête du travail. Ils étaient ainsi un peu moins d’une centaine de personnes à avoir répondu à l’appel à la manifestation unitaire lancé au courant du mois dernier par Samir Larabi, porte-parole du CNDDC. Car il s’agissait surtout d’une initiative afin de faire rencontrer l’ensemble des mouvements de protestation enregistrés dans divers secteurs et franges de la société. Loin de l’engouement espéré, les organisateurs estiment tout de même que cette action est «une réussite».
Etaient présents des représentants de la Coordination des étudiants, des syndicalistes du CLA, du CNES, des membres des partis politiques, comme le MDS, le PST, ou encore de la société civile, à l’instar du MJIC, d’Algérie Pacifique, de SOS Disparus, ou encore de l’association Nedjma. «Nous avons atteint notre objectif, qui est de rassembler divers horizons et sensibilités. De même, il y a eu des prises de parole libres, afin de laisser les gens exprimer tout leur soûl», commente M. Larabi.
La présence la plus remarquée fut tout de même celle de Dalila Touat, dont les déboires judiciaires ont défrayé la chronique la semaine dernière. «Les revendications des chômeurs sont pourtant simples. Comment expliquer que dans un pays riche de tant de ressources naturelles, l’on affiche tant de mépris envers des citoyens qui ne demandent qu’à travailler, à vivre ?», s’indigne, émue aux larmes, la jeune femme.
Diplômée de son état, Dalila est sans emploi depuis des années. Arrêtée par la police à Mostaganem pour distribution de tracts, elle a finalement été relaxée jeudi dernier. «Il faut que les autorités fassent quelque chose. Elles sont loin de nous. Il faut qu’on nous regarde, où que nous soyons, dans le Sud ou à l’intérieur du pays», ajoute-t-elle.
En dépit de l’important dispositif sécuritaire, le regroupement, fermement quadrillé, a pu, plus d’une heure durant, discourir et tenir tête aux policiers. «Dignité, égalité des chances, travail décent, libertés individuelles et civiles», sont les leitmotive des contestataires pacifiques. «Nous sommes actuellement en discussion avec la Coordination des étudiants afin de parvenir à une jonction de nos initiatives. De même, nous envisageons d’établir une plateforme minimale avec d’autres organisations en lutte», assure M. Larabi. Quel est le comble pour un chômeur ? Tenir un rassemblement le 1er mai, jour de la fête du Travail, afin de revendiquer un emploi. «Action paradoxale dont nous escomptons en faire une tradition, en la réitérant l’année prochaine, et celles à venir…», projette M. Larabi.
Ghania Lassal
Lu pour vous dans EL WATAN
le 30.04.11
Totalement absente sur le terrain des luttes sociales
L’UGTA sort de son hibernation
Le nombre de grèves et de manifestations est une cinglante preuve de l’énorme recul de l’UGTA sur le terrain des luttes ouvrières.
L’UGTA a fini par sortir de «son silence». Et de quelle manière ! Pouvait-elle faire autrement, au risque de signer carrément son acte de décès, à la veille d’un aussi grand jour qu’est le 1er Mai, fête internationale du Travail. Il fallait alors qu’elle fasse quelque chose pour prouver qu’elle est toujours en vie à travers un communiqué, une petite interview de son patron…
Sidi Saïd sort enfin de son silence pour venir, dans un entretien express à l’APS, justifier l’étendue de l’apathie dans laquelle est plongée la centrale syndicale en soutenant qu’il travaillait dans «la discrétion».
Difficile exercice pour le secrétaire général de l’UGTA qui revendique 1 500 000 adhérents pour démontrer que la représentativité de son organisation est toujours intacte. La réalité du monde du travail, qui a connu de profondes mutations, dit pourtant autre chose. Car lorsqu’on évoque aujourd’hui le terrain de la revendication sociale, on pense automatiquement aux syndicats autonomes. Mais qu’à cela ne tienne, Abdelmadjid Sidi Saïd n’hésite pas à s’approprier les acquis sociaux arrachés de haute lutte par des centaines de milliers de travailleurs qui ont massivement quitté la centrale pour syndiquer dans des organisations autonomes et indépendantes. C’est indéniablement grâce à ces nouveaux outils dont se sont dotés les luttes sociales dans le pays, que le pouvoir d’achat, des enseignants, des universitaires, des médecins s’est, un tant soit peu, amélioré. `
Si l’UGTA garde un peu la main sur certains secteurs d’activité (ArcelorMital, la zone industrielle de Rouiba), elle s’est, toutefois, montrée incapable d’assurer les termes du pacte social et économique, une sorte de traité de non-agression qu’elle a signé avec le gouvernement et le patronat lors d’une réunion tripartite tenue fin 2006. Jamais le front social n’a connu une si grande ébullition que ces dernières années, et jamais le monde syndical n’a été aussi décidé à s’émanciper du «joug» d’une «centrale» devenue amorphe et dévitalisée. Les travailleurs le savent et la situation de «servitude» dans laquelle se trouve l’Union générale des travailleurs algériens est désormais plus claire qu’elles ne le sont les activités «discrètes» de Sidi Saïd et de son équipe.
Le nombre de grèves et de manifestations qui ont rythmé le front social ces derniers mois, propulsées par une nouvelle dynamique syndicale autonome, est une cinglante preuve de l’énorme recul de l’UGTA sur le terrain des luttes ouvrières.
Marquer le coup à la veille du 1er Mai
L’essentiel était donc de marquer le coup à la veille du 1er Mai. Le responsable de la centrale syndicale fait semblant de reprendre l’initiative en lançant une importante campagne de marketing que d’aucuns savent n’a aucune prise sur la réalité. Il annonce ce qu’il appelle les commandements de l’UGTA pour «consolider et améliorer le pouvoir d’achat des citoyens algériens». Il s’agit en fait de sept propositions. Première proposition : pour arriver à une meilleure organisation du marché des fruits et légumes, la «réactivation de l’OFLA», à titre d’exemple, est jugé comme un dispositif susceptible de «permettre de juguler les prix autour d’un niveau socialement acceptable et économiquement viable». La seconde proposition concerne la «réactivation de l’Office national d’importation et d’exportation» des produits d’alimentation.
Cet office, initialement appelé Onaco, distributeur public de ces produits, est destiné à réguler les prix et les marges de bénéfices des produits d’importation tels que les légumes secs, le café, le thé ou le sucre. L’UGTA demande aussi à subventionner les matériaux de construction. Tout le monde sait, mieux encore les initiés à la chose économique, que la centrale syndicale est en pleine affabulation en demandant à l’Etat de gérer les monoprix comme à l’époque de l’économie socialiste que symbolisaient, en son temps, l’OFLA et l’Onaco. Le populisme qui se décline à travers les propositions de l’organisation de Sidi Saïd, qui démarche pour un gouvernement qui n’arrive pas à sortir le pays de l’économie rentière, s’apparente beaucoup plus à un véritable bricolage syndical pour occuper le terrain à l’occasion du 1er Mai.
Said Rabia
Lu pour vous dans EL WATAN
le 30.04.11
Oran : Une marche silencieuse à la mémoire de Kerroumi empêchée par la police
La marche silencieuse à la mémoire d’Ahmed Kerroumi, à laquelle a appelé la CNCD-Oran a finalement été empêchée par les forces de l’ordre.
Un important dispositif policier a assiégé, tôt le matin la place Kahina (ex-Cathédrale), d’où devait s’ébranler la marche, pour atteindre la place du 1er Novembre (ex-place d’Armes). Les manifestants, au nombre d’une bonne centaine, s’étaient regroupés sur le parvis de l’ex-Cathédrale, devenue depuis la bibliothèque municipale d’Oran. Ils arboraient les portraits du feu Pr Kerroumi, et portaient tous un brassard noir, en signe de deuil. Parmi eux, on pouvait compter son épouse, nombre de ses collègues, des camarades du MDS, ainsi que des militants de la CNCD-Oran. Dalila Touat, en signe de solidarité avec la famille du défunt, tenait à être présente également.
Aucun slogan n’a été entendu, les manifestants, se sont contentés seulement d’arborer les portraits de leur ami, et de garder un silence de marbre, silence par lequel ils voulaient « faire passer leur message ». Le rassemblement sur le parvis de l’ex-Cathédrale a duré une bonne heure, ensuite de quoi, les manifestants ont fait une tentative de marche. Le cordon policier s’est alors renforcé, et n’a pas tardé à contenir la foule. Toutefois, aucune animosité n’a été signalée. En catimini, un commissaire a lancé cette directive au cordon policier : « empêchez-les de marcher, mais sans les brutaliser ! »
Impuissants, les manifestants se sont donc assis sur les marches de la bibliothèque, continuant à garder le mutisme le plus complet. Ensuite, chacun des amis du Pr Kerroumi, collègues ou étudiants, a prit la parole, le temps de lui rendre un petit hommage. De solennels discours ont alors été clamés, où on pouvait déceler à la fois de l’émotion, de la détermination, mais encore de la colère face au silence de la justice sur les raisons de cette tragique disparition.
Lors de son intervention, Messaoud Babadji, collègue et ami personnel du Pr Kerroumi, a décrété que la bibliothèque où la foule était rassemblée devra porter désormais le nom du défunt, et la place Kahina, elle, « s’appelera Maïdane Et-Tahrir (place de la libération) ». Il a été annoncé aussi qu’une énième demande sera adressée, dès demain, à la Wilaya d’Oran, pour la tenue d’une autre marche les jours à venir. « On continuera à leur adresse des demandes d’autorisation, et cela jusqu’au jour où ils comprendront que la marche est un droit universel ! » a-t-on déclaré.
Enfin, aux environs de 12h30, les manifestants se sont dispersés dans le calme, sans qu’aucun n’eût été arrêté.
Lu pour vous dans EL WATAN
le 29.04.11
à Alger, match et marches : Un vrai défi sécuritaire
Les supporters de la JSK, sujets inquiétants, considérés comme des militants politiques, peuvent se faufiler et rejoindre les marcheurs du samedi».
«Yatlaâ laâlam hatta yeskot ennidham» (le drapeau sera levé jusqu’à la chute du régime), promettent les supporters de l’USM El Harrach aux autorités s’ils perdent la finale qui les opposera dimanche à la JSK. Cette rencontre, classée dans les matchs à haut risque par les forces de sécurité, intervient par ailleurs dans une conjoncture politique délicate. Le président Bouteflika, qui devra lui-même remettre la coupe, devrait être présent dans les gradins du stade du 5 Juillet aux côtés des plus hauts responsables de l’Etat et des quelque 55 000 supporters correspondant au nombre de tickets mis en vente par l’Office olympique Mohamed Boudiaf. Dans les deux camps, où le nombre de supporters est estimé à 27 500, chacun scande d’ores et déjà des slogans hostiles au pouvoir. «Et ce n’est que le début», promettent les supporters kabyles. Un véritable casse-tête pour les différents corps de sécurité.
Le premier défi est d’assurer la sécurité du Président. «Rien n’est laissé au hasard, nous imaginons tous les scénarios possibles, d’autant qu’avec ce qui se passe dans le monde arabe, nous devons élargir notre champ d’action», indique une source à la direction de la sécurité et la protection présidentielle. Deuxième défi : l’établissement d’un périmètre de sécurité pour l’accueil des hauts responsables civils et militaires. Des réunions intenses entre la Direction générale de la Sûreté nationale, la DSPP ainsi que la Gendarmerie nationale ont lieu actuellement pour coordonner l’action du 1er mai prochain. «Vous savez, nous sommes devant une situation très complexe.
D’abord, il y a le profil des supporters des deux équipes. Dès samedi, les supporters de la JSK, sujets inquiétants considérés comme des militants politiques, peuvent se faufiler à travers les mailles du dispositif sécuritaire et rejoindre les marcheurs du samedi. Et nous ne pouvons pas les empêcher de rejoindre la capitale», explique un haut responsable sécuritaire. De l’autre côté, il y a les supporters d’El Harrach… «El Kawassir (leur surnom) sont en quelque sorte les hooligans algériens ! poursuit-il. Donc, nous devons être vigilants et mettre en place un dispositif qui nous évitera tout frottement entre supporters et réserver l’utilisation de la matraque qu’en cas d’extrême nécessité», poursuit-il. Mercredi dernier, le quartier de Boumaâti a connu des affrontements violents entre les habitants d’un bidonville, installé récemment dans cette localité, et les forces de l’ordre. Sur place, les habitants expliquent qu’en cas de défaite, «ils sont prêts à marcher jusqu’à la place des Martyrs et camper jusqu’à la chute du régime».
Pour rappel, la Coordination nationale pour la défense des droits des chômeurs a appelé à une marche dimanche 1er mai. Selon nos sources, les pouvoirs publics vont mobiliser quelque 40 000 policiers, ce jour-là, dans la capitale, essentiellement des éléments des forces antiémeute et des agents en civil. En plus des 2000 policiers des forces antiémeute de réserve. Les points de contrôle seront aussi renforcés. Le directeur de la Sûreté nationale, Abdelghani El Hamel, a interdit, dans une correspondance adressée à toutes ses directions, l’usage de la force. Des plans sont déjà établis pour disperser les supporters après le match et éviter tout contact entre les deux camps, nous assure-t-on à la Direction générale. A cela s’ajoute la mobilisation de 500 gendarmes, l’équivalent de l’effectif du plan Delphine mis en place chaque été. Alger sera ce dimanche plus que jamais sous haute sécurité.